sandrine57

Lectrice compulsive d'une quarantaine d'années, mère au foyer.

8,50
Conseillé par
10 septembre 2013

Dans le petit troquet où elle se rend le soir après son travail, Tsukiko, quarantenaire célibataire et un peu solitaire, croise par hasard Matsumoto Harutsuna qui fut son professeur de japonais. Ils ont le même goût pour les flacons de saké chaud, les échalotes au sel, les tiges de lotus frites et les haricots fermentés au thon. Malgré leur grande différence d'âge, Tsukiko et celui qu'elle appelle "le maître" se rapprochent au fil de leurs rencontres fortuites derrière le comptoir du bar qu'ils fréquentent. Parfois, ils ne se voient pas pendant des semaines, parfois ils se donnent rendez-vous pour une promenade au marché ou la cueillette des champignons. A mesure que le temps passe, Tsukiko prend conscience que ce qui l'unit au maître ressemble plus à de l'amour qu'à de l'amitié.

Mais le professeur, déjà septuagénaire, commence par refuser ses sentiments, conscient du caractère immanquablement éphémère d'une éventuelle liaison.

Merveilleux, délicat, poétique, léger sans être futile...Les mots ne suffisent pas pour qualifier ce récit qui a la grâce d'un haîku, la douceur du bonheur, la tendresse des moments partagés. Il ne s'y passe rien d'extraordinaire, mais on se laisse bercer par ce quotidien décrit dans toute sa simplicité, dans ces petits détails qui font la beauté de la vie. On s'attache à cette femme qui ne manque pas de caractère et à ce vieux professeur qui récite des poèmes et ne se sépare jamais de sa serviette et on les quitte avec un brin de mélancolie.
Roman intimiste et pudique qui raconte une femme et un homme qui s'apprivoisent et osent un nouvel amour, faisant fi des désillusions et des échecs du passé, ces années douces éblouissent comme une pluie de fleurs de cerisiers dont elles ont la magique beauté. A lire sans hésitation.

Une enquête de Kostas Charitos

Points

9,40
Conseillé par
9 septembre 2013

Pour le commissaire Charitos, l'avenir s'annonçait radieux. Après des années à se serrer la ceinture pour payer les études de sa fille, il assiste, fier et heureux, à sa soutenance de thèse. Mais tandis que, son diplôme de droit en poche, Katérina vogue vers la Crète avec son petit ami pour des vacances bien méritées, le bateau est détourné par des terroristes. Aussitôt, Charitos s'envole vers La Canée mais il est écarté de l'enquête et doit très vite retourner à Athènes où un mystérieux tueur s'en prend à des vedettes de spots publicitaires. D'abord enclin à croire à des meurtres homophobes, le commissaire va très vite découvrir que le mobile est tout autre. Il s'agit de détruire le monde de la publicité. Le coeur et la tête en Crète, Charitos cherche des liens entre les deux affaires.

On avait quitté la famille Charitos à la veille des Jeux olympiques de 2004, les revoilà après le grand évènement sportif. Le moment de grâce est passé, Athènes a retrouvé ses embouteillages légendaires et les infrastructures des jeux se dégradent tranquillement au soleil.
Si c'est toujours un plaisir de retrouver le commissaire, ses collègues, sa famille, l'enquête dans ce deuxième opus est un peu poussive et alambiquée. On a bien du mal à comprendre les élucubrations du tueur et les méandres du système audio-visuel grec. Le propos est donc difficile à suivre mais heureusement, le mal trouve ses racines dans le passé et l'auteur en profite pour évoquer l'histoire récente du pays. On apprend donc quelques éléments concernant la position grecque durant la deuxième guerre mondiale, la guerre civile (1946/1949) qui en découla et la dictature des colonels (1949/1967) qui la suivit. A travers son héros, MARKARIS touche aussi du doigt le dilemme du policier, fonctionnaire au service d'un Etat dont il n'approuve pas forcément les méthodes, problème particulièrement vif dans le cas d'une dictature. Charitos a servi durant la junte et se retrouve devant sa fille qui lui demande des comptes. Comment expliquer la violence ? La torture ? Comment se justifier pour ne pas perdre son amour ? Autant de sujets délicats habilement amenés et qui font tout l'intérêt de ce récit instructif et dépaysant. Et tant pis pour l'enquête proprement dite!

Conseillé par
8 septembre 2013

Lulia et son père Stelian ont quitté la Roumanie pour s'installer en France sans rien connaître de la langue de Molière. Si la fillette s'intègre très vite grâce à l'école, les copines, la télé, le père peine à trouver sa place dans son pays d'adoption, gêné par son manque de vocabulaire. C'est de l'institutrice de Lulia que va venir la délivrance, grâce aux ateliers de cuisine qu'elle organise avec les parents tous les mercredis matins. Cuisinier dans son pays, Stelian, d'abord hésitant, finit par se laisser convaincre d'assister à ces moments de convivialité et de partage.

Un roman jeunesse dont le parti pris est l'optimisme, la tolérance, le partage.
Ici point de rejet ou de racisme, Philippe MILBERGUE a choisi d'écrire un récit positif et joyeux qui véhicule les valeurs d'accueil, d'acceptation, d'intégration, de solidarité. Alors sans doute que dans les faits, les choses ne se passent pas aussi facilement et naturellement pour les nouveaux arrivants (et surtout les roumains) mais la naïveté du propos est rafraîchissante. On aime cette France melting-pot, ouverte à tous, ce pays du mariage pour tous et des droits de l'Homme. Un livre à mettre entre les mains de tous les enfants et de leurs parents!

Conseillé par
7 septembre 2013

Dans son château de Sancerre, Victor des Ulmières attend la mort. Entouré d'une joyeuse bande de danseurs et musiciens baroques, il passe ses derniers instants à se repaître de leur jeunesse et à remonter le fil de ses souvenirs : les cures thermales avec sa mère, le désamour de son père, son amour passionné pour sa soeur Aimée, sa haine pour son frère Vivien, son amitié avec Valerio, un écrivain, ses tentatives pour faire carrière dans le journalisme ou l'écriture, les femmes et les hommes qui ont traversé sa vie... Pourtant, l'octogénaire n'est pas malade. Mais il sait qu'il va mourir de la main de Serge, son protégé, son fils spirituel, celui dont il voulait faire son héritier avant qu'une haine féroce ne vienne s'en mêler.

Une vie parfaite ? Certainement pas! Plutôt l'existence frivole d'un aristocrate décadent et oisif, solitaire, égoïste et incestueux. Il est bien difficile de s'attacher à cet homme blasé qui a goûté à tout (hommes, femmes, drogues, ...) sans s'attacher à rien ni personne. Ses souvenirs décousus d'une vie vide de sens, sans amour, sans amis, brossent un tableau sans relief et sans réel intérêt. Dérangeant parce que franc, Victor des Ulmières se livre sans concessions, sans omettre ses pires bassesses, ses aversions, ses trahisons. Ruminant son passé, il ne se justifie pas, ne s'excuse pas, ne trouve pas grâce aux yeux du lecteur qui subit cet étalage souvent gênant. Heureusement, l'écriture de Camille de VILLENEUVE sauve le livre du naufrage et de l'ennui. Distancée mais lumineuse, elle fait preuve de belles qualités littéraires et incite à aller jusqu'au bout de cette histoire.

roman

Le Cherche Midi

Conseillé par
6 septembre 2013

Alors que les métastases envahissent peu à peu son corps, Jean-Claude PIROTTE essaie de se frayer un chemin dans le brouillard que fut sa vie. Assis à sa vieille table de travail, il décortique ses notes dans les carnets qu’il noircit d’encre depuis son plus jeune âge. Rebelle, il s’est parfois détourné du droit chemin. Mais à fréquenter les voyous et les livres, il s’est forgé de solides amitiés et des amours littéraires indissolubles. Pourtant, au soir de sa vie, ce qui le taraude, c’est la culpabilité, celle de s’être fourvoyé dans un mariage sans amour, celle de n’avoir pas su veiller sur les êtres dont il était responsable.

Beaucoup de poésie dans ces pages écrites avec la vérité de celui qui se sait condamné. Des souvenirs épars, bons et mauvais, des aveux, qui raniment les vieilles haines, les premiers amours, les amitiés, les passions. Et survolant tout cela, la seule, l’unique, la toujours fidèle littérature : Chardonne, Mac Orlan, Desnos, Dhôtel pour alléger les moments de peine et partager les joies.
S’accusant de tous les maux, PIROTTE ne se laisse rien passer et pourtant, sa vie chaotique sa vie de nomade, n’est-ce pas cela qui a nourri son œuvre, qui a fait de lui le poète, l’écrivain qu’il est?
La vie est un brouillard mais parfois, une lueur vient en éclairer la noirceur et cette lueur, c’est l’écriture.