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    7 avril 2011

    Ce livre est présenté par l'éditeur comme la première enquête de l'inspecteur Korolev. Il est toujours intéressant d'assister à la "naissance" d'un héros récurrent. Enfin, moi, j'aime bien. Et puis, il est assez sympathique ce flic russe. Une quarantaine d'années, vétéran de la guerre 14/18, ancien joueur de football, divorcé et père d'un petit Youri qu'il ne voit plus guère, voilà pour le profil.

    Il est empêtré dans une histoire difficile et gêné aux entournures par le NKVD et l'angoisse qui règne à Moscou en cette année 1936. En effet, à cette époque, tout le monde espionne tout le monde. Les dénonciations d'un voisin pour récupérer un appartement plus grand, par exemple, ou simplement parce que ce voisin n'a pas une tête très communiste sont légion. Ci-après, une blague de l'époque qui a valu à son auteur, flic, ex-collègue de Korolev, d'être dénoncé et déporté : "C'est un mouton qui tente de franchir la frontière avec la Finlande. "Pourquoi tu veux fuir en Finlande ? lui demande le douanier. - A cause du NKVD, répond le mouton. Le camarade Staline a ordonné que tous les éléphants soient arrêtés. - Mais tu n'es pas un éléphant, dit le douanier. - Oui, je sais, répond le mouton, mais essayez d'expliquer ça aux tchékistes [les hommes du NKVD.]" (p89)

    Cette fois encore, le contexte de ce roman policier est suffisamment dense pour attirer le lecteur et le garder. La peur est omniprésente, l'effroi d'être dénoncé pour rien ajoute du suspense au récit. Même au plus haut du sommet, la lutte existe pour le pouvoir, mais personne n'est sûr de rester au poste qu'il occupe très longtemps. Staline décide, Staline fait et/ou défait les carrières et mêmes les vies. Dès lors, il est donc à peine utile de vous préciser que Korolev se doit d'avancer à pas feutrés, sans faire de bruit ni de vagues. L'enquête prend donc du temps et pour tenter d'en perdre le moins possible, il doit s'allier à la fois à un colonel du NKVD et au chef des Voleurs.

    Contrairement à beaucoup d'autres polars, le récit est assez linéaire : il n'y a que trois chapitres disséminés dans le livre dans lesquels le tueur s'exprime, en aparté, tout le reste est consacré à l'enquête proprement dite et à Korolev quasiment présent de bout en bout. C'est plutôt pas mal de quitter un peu le modèle dominant du moment dans lequel le tueur intervient très souvent, en parallèle de l'enquêteur.

    Pour conclure, pas mal du tout cet inspecteur Korolev. Convaincant, évoluant dans un cadre fort et peut-être une petite histoire d'amour qui s'annonce ?