Arpenter la nuit

Leila Mottley

Albin Michel

  • Conseillé par (Libraire)
    8 septembre 2022

    Retour à Oakland

    Par nos conseils, nous vous avions déjà emmenés à Oakland, avec le sublime "Ici n’est plus ici", roman choral de Tommy Orange autour de personnages amérindiens autochtones. Nous retournons ici dans la baie de San Francisco avec ce magnifique roman, paru dans la même collection, « Terres d’Amérique, et en lice pour le Booker Prize et le Prix Page America, écrit par Leila Mottley alors qu’elle n’avait que 17 ans !
    Il suffit d’en lire quelques pages pour être instantanément happé par l’écriture pleine d’images de la jeune autrice, sans même parler de l’attachement que l’on ressent immédiatement pour le personnage principal, Kiara, qui fait tout pour garder la tête hors de l’eau et protéger sa famille. Entre un père décédé, une mère internée et un frère qui ne vit que pour son rêve de percer dans le rap, Kiara 17 ans, est la seule à essayer de joindre les deux bouts pour conserver l’appartement familial. Mais que faire quand on est si jeune et que le travail ne court pas les rues ? Un soir, presque sans le vouloir, Kiara se prostitue, serait-ce là la solution à ses problèmes ? Bien vite, l’engrenage de la violence se referme sur elle… Mais que doit-on réellement à ceux que l’on aime ?
    Si les thématiques de ce roman sont sombres, l’écriture n’en est que plus lumineuse ! Leila Mottley nous offre un texte aussi réussi sur le fond que sur la forme, porté par la traduction de Pauline Loquin, révélant des qualités de virtuoses et une réflexion passionnante sur les violences dont sont victimes les femmes noires aux États-Unis.


  • Conseillé par
    8 décembre 2022

    Etats-Unis, vie moderne

    Elle m’a touché, Kiara, qui tente de s’en sortir dans West Oakland : elle habite d’abord avec son frère aîné, puis seule, après que celui-ci se soit fait arrêté, et enfin avec Trevor le petit garçon du dessus.

    Son père est mort et sa mère est en réinsertion quelque part. Son frère Marcus ne rêve que de percer dans le rap et ne sait pas garder un travail. Alors c’est à elle, Kiara, de se débrouiller pour payer le loyer et les courses.

    Kiara se prend d’amitié pour Trevor, le garçon de 9 ans du dessus dont la mère droguée ne s’occupe pas, délaissant de plus en plus l’appartement. Et c’est Kiara qui se charge de payer les deux loyers.

    J’ai été en colère contre Marcus qui ne sait visiblement rien faire, même pas rapper correctement d’après Kiara, incapable de tenir un emploi plus de quelques jours. Un jeune homme plein de colère qui refuse de voir la réalité.

    J’ai aimé Trevor qui, lui, se rend un peu compte de la situation et qui parie sur des matchs de basket pour gagner quelques dollars.

    J’ai aimé que le ciel de la ville face lui aussi partie du décor, ni tout à fait bleu, ni tout à fait gris.

    J’ai aimé les leitmotivs du récit : l’empreinte du pouce de Kiara tatoué sous l’oreille de Marcus ; les ongles tellement rongés de Kiara qu’elle est obligée de cacher ses mains ; le terrain de basket comme unique repère pour Trevor ; la piscine de l’immeuble pleine de caca de chiens.

    J’ai eu de la peine pour Camila à la couleur de cheveux changeante, qui aide parfois Kiara mais sans en faire trop, juste assez pour que Kiara ne devienne pas victime de son travail.

    Un récit qui m’a parfois mis mal à l’aise car Kiara se voit comme une accusée alors qu’elle est une victime.

    Un récit poignant sur les conditions de vie de certains enfants dans le pays le plus riche du monde.

    Quelques citations :

    "(…) le masque de ma mère finit par s’écailler et elle est là entre mes genoux à me demander de la réparer alors que c’est moi qui suis venue ici pour me faire aider." (p.133)

    "Voilà ce que ça fait de se fier uniquement à la plante de ses pieds et au bruissement de ses hanches pendant si longtemps : impossible de lâcher quoi que ce soit, de laisser se rompre la digue. (p.315)

    "Le silence ça donne faim, ma puce.? Et il faut que tu manges." (p.354)

    L’image que je retiendrai :

    Kiara ne connaît pas les noms des policiers qui la violent et la menacent, mais seulement leur numéro de plaque.

    https://alexmotamots.fr/arpenter-la-nuit-leila-mottley/


  • Conseillé par
    22 septembre 2022

    « Je n’étais qu’une enfant »

    Oakland. Kiara et son frère aîné Marcus sont acculés par les dettes, de père disparu, leur mère en prison…Face à l’inactivité de son frère, Kiara, jeune afro-américaine, cherche des solutions et, naïvement sur un quiproquo, est emportée dans une spirale prostitutive.

    Premier roman de la très jeune Leila Mottley qui, d’un style léger mais très mature, dénonce l’exploitation sexuelle de jeune filles noires par les policiers.
    L’écriture est directe, portant un regard féministe sur la violence sourdine doublement injuste qui menace la position d’être une femme et noire ; la masculinité s’appropriant les corps sans état d’âme.
    Bien que le personnage rationalise sa situation, elle doit survivre au milieu des prédateurs tout en maternant son frère et le jeune Trévor délaissé par sa mère.

    Point de vue réaliste d’une adolescence vulnérable et désenchantée rendue invisible par la société, mais dont le courage peut générer l’espoir.
    Intime et sensible.

    « On a fini par devenir trop grands pour nous-mêmes »
    « Et je crois bien que ça pourrait être ça cet amour qui met tout l’univers sur pause »


  • Conseillé par
    17 septembre 2022

    Kiara, jeune fille désabusée tente de sauver son frère et elle de la rue en multipliant les emplois. Toutefois en étant mineure et sans diplôme, la tâche devient rapidement impossible ; une seule option semble se présenter à elle : la prostitution. Kiara va petit à petit perdre pieds jusqu'au moment où son entourage va lui insuffler une force indocile dans son combat face à la justice.
    Inspiré d'un fait divers récent, Leila Mottley signe ce roman très prometteur à l'âge de 17 ans. A la fois tragique et lumineux, c'est une merveille de poésie et un exemple de combativité.