Fracture

Eliza Griswold

Globe

  • Conseillé par (Libraire)
    26 mars 2020

    "La malédiction des ressources naturelles"

    Cette expression s’appuie sur des faits : les populations qui vivent sur les terres les plus riches en ressources naturelles sont généralement les plus pauvres, ceux à qui cela profite le moins... Dans « Fracture », nous voici en Pennsylvanie, au cœur du pays du « rêve américain » ! Eliza Griswold, journaliste d'investigation, se penche sur l'histoire de Stacey, infirmière, et de ses deux enfants, qui vivent dans une ferme en pleine campagne. Nous sommes à la fin des années 2000 et l'exploitation du gaz de schiste est en train d'exploser. Stacey, comme la plupart de ses voisins, décide de louer sa terre à une entreprise de fracturation hydraulique. Cette méthode implique d'envoyer dans le sol des milliers de litres d'eau pour que le schiste "explose" et libère du gaz. Outre la consommation colossale d'eau, cette façon de faire présente un autre problème : l'utilisation de produits chimiques et la libération d'autres substances, certes naturelles, mais néanmoins très dangereuses... À partir du moment où le site est exploité, Stacey et sa famille constatent une baisse de la qualité de l'eau et de l'air. Harley, le fils aîné, tombe même gravement et inexplicablement malade... Petit à petit, une explication s'impose : il a été empoisonné par des produits chimiques, tout comme sa mère et sa sœur, dans une moindre mesure... La famille est alors loin de se douter que leur combat pour retrouver de l'eau consommable et un espace de vie sain va durer des années ! C'est ce récit que nous raconte la journaliste : un récit qui allie à la perfection précision des faits, vulgarisation scientifique et qualités littéraires. C'est un texte qui met le doigt sur ce qui ne tourne pas rond, non seulement aux USA, mais aussi dans toutes les sociétés capitalistes, où les intérêts des entreprises priment sur les intérêts des citoyens...! Un ouvrage qui met à l’honneur ceux qui osent s’élever contre la toute-puissance industrielle : avocats, médecins, activistes, écologistes, mais aussi « simples » citoyens, comme Stacey et sa famille.


  • Conseillé par
    29 septembre 2020

    essai

    Une enquête racontée comme un roman ayant pour personnages principaux la famille Haney (Stacey, son fils Hatley et sa fille Paige).

    J’ai aimé Stacey, mère célibataire qui se bat chaque jour pour joindre les deux bouts entre son travail à l’hôpital, son fils malade, et ses animaux qui meurent les uns après les autres.

    Pas facile de quitter sa maison, même si celle-ci est empoisonnée, pour aller vivre dans une caravane dont les parois gèlent en hiver.

    J’ai aimé Kendra Smith, l’avocate des plaignants, qui ne lâche jamais l’affaire, aidée de son mari, quitte à mettre leur cabinet en danger.

    Je n’ai pas compris Beth Voynes, la voisine la plus proche du site, qui, malgré ses éruptions cutanées et sa difficulté grandissante à respirer ne part pas. Même son médecin lui conseille de se tenir éloignée le plus possible de sa maison dans la journée.

    Bien sûr, il est question dans cet ouvrage des ravages de l’exploitation du gaz de schiste : la pollution de l’eau potable (les habitants sont obligés de faire venir des buffles d’eau potable devant leur maison), la pollution de l’air, les maladies entraînés par l’utilisation de substances chimiques hautement nocives.

    L’auteure démontre, faits et preuves à l’appui, que l’agence gouvernementale chargée de suivre le bon déroulé de l’exploitation est de mèche avec la compagnie Range ; que les résultats des analyses sont modifiés par la compagnie Range.

    Compagnie Range qui n’hésite pas, chaque année, à se rendre à la foire et acheter les meilleurs bêtes des fermiers alentours. Belle opération de communication.

    Bien sûr, il y a les incontournables passages sur les joutes judiciaires, mais que j’ai facilement lu en diagonale.

    L’auteure montre, si on en doutait encore, que l’argent est roi, car même la lettre de Stacey à Obama l’alertant sur les périls que courent sa famille ne suscite aucune réponse.

    L’image que je retiendrai :

    Celle des buffles d’eau potables devant les maisons. Stacey avait connu la même chose étant enfant, et s’était jurée de toujours avoir de l’eau potable à disposition.

    https://alexmotamots.fr/fracture-eliza-griswold/